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Les années R I C H T E R 1964-1997
Les années R I C H T E R 1964-1997
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« Et à Meslay, sous ces voûtes de bois du XIII e siècle, la musique sonne à l’unisson de cette admirable architecture. Ceux qui ne sont pas particulièrement musiciens peuvent néanmoins admirer et jouir de cette salle magnifique. »
Rencontre d’un lieu et d’un artiste
« C’est là que je veux jouer. »
Témoignage
C’est une journée d’hiver haïssable, pluie et brouillard, pieds dans la boue, mains glacées. Présentation de la grange derrière son rideau de bruine. O miracle, c’est le coup de foudre…En raison de quelles mystérieuses affinités Sviatoslav Richter s’est-il épris de la Touraine? Pour la tranquillité, peut-être, de ce pays sans violence, harmonieux jusque dans ses petits villages, et qui fut tant aimé des rois. Pour la subtile et légèrement voilée lumière qui baigne le pays tourangeau; déjà elle fascinait le peintre Turner, elle ne put que séduire Sviatoslav Richter, cet amoureux de paysages et de peinture. Pour aussi, sans doute, la vaste dimension des plateaux comme celui de Parçay-Meslay, au-dessus duquel se déploie un ciel immense, sans fin. Horizons infinis qu’il aime. Enfin, miracle suprême, parce qu’un jour de grâce de l’an 1963, il découvrit la Grange de Meslay, à l’époque simple grange dévolue aux tâches agricoles et parfaitement inconnue. Son génie fut de percevoir la magie du lieu, à la fois grandiose et commun, demeuré authentique et comme imprégné encore de la ferveur des moines qui construisirent l’édifice au XIIIe siècle. « Alors, dit-il aussitôt, c’est là que je veux jouer. » Et depuis son premier concert le 23 juin 1964, jamais il ne se départit de sa fidélité au pays de Touraine.
Pierrette Boille, co-fondatrice des Fêtes musicales en Touraine
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Photographie à la Grange (Gérard Proust) |
Témoignage
- Vous allez me photographier Richter à Meslay !
Juin 1964, j’étais le petit stagiaire de la locale de La Nouvelle République. J’allais de la pénombre d’un laboratoire-photo aux odeurs d’hyposulfite à l’escorte de Jean Royer dans ses tournées de premières pierres, le Rolleiflex sur le ventre. - Meslay, c’est où? Richter, c’est qui ?A la place d’un sinistre mécano chapeauté de tôle ondulée, la grange est là, discrète, derrière son porche en majesté. La façade est lourde et sobre mais il faut pousser la porte pour voir le miracle opérer : c’est un vaisseau, c’est une nef, une invitation au voyage, un appel à la méditation. Grandiose! Dans la pénombre, au milieu d’un aréopage, il est là, solide comme une basse russe, caressant affectueusement de la main le foin échevelé d’une antique charrette. C’est lui, c’est Richter! Le Maître prend possession de Meslay. Une chouette en fut perturbée dans son repos diurne.
- Si Maestro te voit photographier, il interrompt son concert!
J’étais prévenu, j’étais paralysé, le doigt tremblait sur le déclencheur. Pendant cette cinquantaine d’années, j’ai appris à me faire silhouette discrète, de pilier en pilier. Combien d’heures de supplice ai-je patienté, l’appareil photo encapuchonné attendant le forte pour un déclic.
- Je ne suis pas photogénique!
Richter n’aimait pas être photographié, mais il s’empressait de récupérer les tirages avec soin, les montrait à Nina son épouse et riait de son attitude. Il se plaisait à se mettre en scène, nouant son pull comme une corde ou poussant un vieil engin agricole avec la complicité de Pierre Boulez. Certains jours, Maestro voulait jouer dans le noir. Ce qui compliquait la tâche du photographe. Imaginez des concerts avec une fragile lampe de chevet, d’une dizaine de watts, pincée au coin du pupitre et le visage de Sviatoslav caressé par le pâle reflet de la partition. Cela donnait des effets d’irréel, de flou, de filé aux images avec des obturations au quart de seconde. Dans mon album personnel, il est quelques images empreintes d’émotions particulières. C’est Jessye Norman enveloppée d’une robe noir et blanc digne des Oiseaux d’Hitchcock, voix imposante puis feutrée alors que les éclairs de l’orage strient la charpente. C’est l’obscurité. On allume en hâte un chemin de bougies en bord de scène. La soprano reprend sa mélodie et les éclairs zèbrent l’espace. Voilà les applaudissements, j’allais écrire, un tonnerre d’applaudissements… le triomphe, la magie d’une nuit ? C’est Meslay. Meslay, c’est Stockhausen au pupitre électronique, un regard pétillant à la Trenet, tandis que deux musiciens s’agitent entre un piano et une galaxie de percussions cuivrées. Meslay, c’est le coq qui confond projecteur et lever du jour pour s’égosiller contre une frêle partition de Liszt. C’est le ballet d’une chauve-souris en rase-mottes sur les spectateurs. C’est une chouette effraie qui froisse ses ailes sur un piano préparé. C’est le Quatuor Via Nova qui joue les gardiens de la basse-cour. Meslay, c’est le souvenir aussi des années 1960, avec son carré d’officiels cravatés, placés par les jeunes filles tourangelles habillées en demoiselles d’honneur. Avec les années 2000, le lamé est devenu jean.
Gérard Proust
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Mémoire d'un festival. 50 ans de Fêtes musicales en Touraine.
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Mémoire d'un festival. 50 ans de Fêtes musicales en Touraine.
- Éditeur: Editions Alan Sutton
- Date de publication: 9 mai 2014
- Langue: Français
- Dimensions du produit (L x l x h): 26 x 23.2 x 1.8 cm; 921 g
- Longueur du livre: 160
- ISBN-10: 2813807699
- ISBN-13: 978-2813807694
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